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FO ESR


Une rentrée préoccupante !

La situation est inquiétante pour le fonctionnement des universités et les conditions de travail des personnels. On s’attaque aux universités, aux disciplines, à nos statuts, à nos libertés, on s’attaque aux conditions de travail de tous les personnels. Alors que de toutes parts nous remontent les plaintes et les récriminations des collègues, Geneviève Fioraso, avec l’accompagnement de quelques syndicats et de la CPU, poursuit aveuglément les « pseudo-réformes » qui accentuent les problèmes qu’elle prétend résoudre, loin de toute négociation. La réforme de l’enseignement supérieur menée à marche forcée remet en cause les libertés universitaires sans lesquelles il n’y a pas d’universités dignes de ce nom. La rentrée est préoccupante à plusieurs titres :

  • Les regroupements imposés se mettent en place dans l’urgence et l’improvisation, parfois sans respect des règles de procédures, presque toujours contre l’avis des personnels. Partout les projets de statuts prévoient la nette diminution de la représentation du personnel dans les CA de COMUE ainsi que le très fréquent recours au suffrage indirect pour les élections de ces CA et des conseils académiques. Les établissements n’auront d’autre rôle que d’appliquer les décisions des instances des COMUE. Les rares statuts de Communautés d’Universités et d’Établissements (COMUE) présentés au Cneser montrent une nette contradiction entre le vote majoritairement positif des CA des établissements et le rejet massif par les CT de ces mêmes établissements (Comités Techniques élus au suffrage direct et représentant à égalité tous les personnels). Ces statuts ont d’ailleurs été rejetés par le CNESER.
  • Le nouveau décret statutaire relatif aux enseignants-chercheurs a été signé le 2 septembre dernier. Bien loin d’améliorer le précédent, il accentue le clientélisme et met en cause le caractère national de notre statut au risque d’alimenter toutes les dérives. Tous les dangers que nous avions dénoncés lors des débats du Comité Technique Universitaire demeurent. Le nouveau décret amoindrit notamment le rôle du CNU au mépris de l’attachement fort des universitaires au traitement paritaire, disciplinaire, scientifique et indépendant de leur carrière. Par ailleurs, aucune garantie n’est prévue par le texte en ce qui concerne la liberté de recherche pourtant reconnue par la loi mais si peu respectée, et aucune procédure de protection spécifique des personnels n’apparaît, alors que de plus en plus d’établissements ne respectent pas les textes réglementaires, que des collègues se voient expulsés de leur labo ou interdire de rejoindre un autre labo, et que les abus et harcèlements se multiplient.
  • Les nouvelles obligations liées à l’application de la loi ESR, et notamment celles liées au cadre national des formations, viennent encore alourdir les charges des personnels universitaires, sans compensations ni reconnaissance quelconque, au détriment de leurs missions fondamentales, au moment où les établissements, de plus en plus nombreux à connaître de sérieuses difficultés budgétaires, coupent dans les formations.
  • A la notion traditionnelle de droit clairement défini par la loi et par ses textes d’application, le Ministère, dans le cadre des projets de Mme Lebranchu, Ministre de la Fonction publique, tente de substituer la notion de « droit souple » laissé à l’appréciation de petits chefs locaux. Que deviendra, dans une telle conception, le statut des personnels d’Etat des fonctionnaires des universités ?
  • Avec le gel du point d’indice depuis quatre ans, et qui serait prorogé pendant encore 3 ans, la baisse, bien réelle, de nos rémunérations ne cesse de s’amplifier.
  • Le décret 2014-780 du 7 juillet 2014 relatif à la composition de la formation restreinte du Conseil Académique chargé d’examiner les questions individuelles concernant les enseignants-chercheurs doit s’appliquer à partir du 1er septembre. Force Ouvrière avait souligné l’impossible application de l’exigence de double parité, MCF/PR et Hommes/Femmes, et voté au CTMESR contre le choix retenu par le Ministère de confier au Président du Conseil Académique le soin d’éliminer le nombre de membres élus nécessaires pour assurer la double parité (8 voix contre : FO, FSU, CGT et 6 voix pour : UNSA et SGEN-CFDT). Le rôle prépondérant accordé au président du Conseil Académique, qui peut modifier les équilibres issus de l’élection et écarter arbitrairement de la formation restreinte certains élus, est un choix scandaleux et l’entêtement du Ministère à mettre en place des dispositions inapplicables constitue une nouvelle attaque contre la démocratie universitaire. Les difficultés sont telles que le président de la CPU recommande, « avec l'accord informel » de Geneviève Fioraso, de ne pas appliquer les nouvelles dispositions jusqu’aux élections des nouvelles instances.
  • Au moment où les deux ministres affirment la priorité à la pédagogie, on ne peut qu’être inquiet de l’appui donné par le ministère au rapport « soutenir la transformation pédagogique dans l’enseignement supérieur » tant celui-ci est marqué du sceau d’un pédagogisme qui a pour premier objectif la dépréciation des enseignants-chercheurs, prétendument mal formés et décalés par rapport aux nouveaux étudiants, et la négation de leur liberté pédagogique.
  • Ainsi que nous l’avions annoncé, la mise en place des ESPE, menée à la hussarde dans une précipitation telle que l’on n’a même pas attendu d’avoir un cadre légal, s’accompagne d’une grande confusion. L’hybridation du concours et du diplôme dans la formation fait déjà ressentir ses effets pervers. Les cas prévisibles des reçus/collés majoritaires et des lauréats déjà titulaires d’un master n’ont pas été réellement prévus et mettent à mal les principes mêmes sur lesquels repose le cursus des ESPE. Des exigences impossibles à satisfaire risquent de mettre en échec de nombreux étudiants auxquels on proposera au mieux de venir garnir les rangs des contractuels. Les forums se font l’écho du désarroi des étudiants déboussolés par les informations contradictoires des ESPE. Il faut encore souligner la difficile situation des fonctionnaires stagiaires affectés dans une autre académie que celle où ils ont effectué leur M1 et les conséquences sur les Masters de recherche des universités.

Les décrets d’application de la loi ESR donnent la pleine mesure de l’aggravation des conditions d’exercice de nos métiers. Jamais les universités françaises n’ont été davantage soumises au pouvoir politique et leurs personnels autant malmenés et méprisés. Les dispositifs mis en place par le Ministère n’apportent aucune réponse satisfaisante aux problèmes de l’enseignement supérieur, pas plus qu’ils ne recueillent l’adhésion des personnels.

Chaque jour de nouvelles raisons d’alimenter le mécontentement des personnels apparaissent. Les libertés académiques sont réduites comme une peau de chagrin et les garanties statutaires des personnels détricotées jour après jour sous les attaques conjuguées du ministère et des présidences.

Ces changements ont lieu dans un contexte d'austérité aggravée par le pacte de responsabilité. Avec des établissements étranglés financièrement et qui continuent de geler des postes, ces réformes mettent en œuvre le désengagement de l'Etat. Ainsi les Contrats de Plan États-Région (CPER) 2015 – 2020 devraient voir baisser de moitié les crédits pour l'ESR. La Bretagne et les Pays de la Loire voient l'enveloppe du CPER pour l'ESR divisée par trois.

Seule l’action des personnels permettra de résister aux dégradations causées par les réformes et l'austérité. SUPAUTONOME-FO et le SNPREES-FO se félicitent que cette résistance s'est déjà concrétisée par les votes négatifs au Cneser du 22 juillet et du 15 septembre des statuts de 5 COMUE. Avec d'autres syndicats nous demandons au gouvernement de ne pas signer les décrets approuvant ces statuts rejetés. SUPAUTONOME-FO et le SNPREES-FO appuieront toutes les initiatives et prises de position pour faire échec à la mise en place des COMUE et continueront leur combat pour défendre toujours davantage le statut national et l’indépendance des personnels universitaires.

Montreuil, le 1er octobre 2014