STOP A L’OBSTINATION INDECENTE VISANT A MAINTENIR « ETAMINE/NOTILUS/GOELETT » :
Les personnels du CNRS ne sont pas des Shadoks !
Le 7 décembre 2023, le Président Emmanuel Macron a reçu à l’Elysée plus de 300 chercheurs, représentants d’établissements de l’enseignement supérieur ou d’instituts de recherche, et chefs d’entreprises, pour présenter sa vision pour l’avenir de la recherche française. Si nous considérons à FO ESR que (i) transformer nos organismes nationaux de recherche en agences de programmes ou que (ii) persévérer dans l’autonomie des universités sont des mesures à proscrire, car très largement porteuses de souffrance au travail, nous voudrions cependant souligner un aspect moins « obscur » de son discours qui fait sens pour tous, c’est-à-dire celui où il appelle de ses vœux un « choc de confiance » pour « simplifier les procédures et alléger la charge administrative des chercheurs et des chercheuses ».
Cette carence du CNRS avait déjà été dénoncée par le conseil scientifique dans son « livre blanc » en mai 2023 et réapparaît lors de l’évaluation du CNRS par l’HCERES en novembre 2023, le rapport de visite soulignant que : « Le fardeau administratif est trop lourd à tous les niveaux. De plus, la direction générale du CNRS ne semble pas apprécier à sa juste mesure le profond niveau de frustration qui règne dans l'ensemble du système. »
Pour nous, le symbole récent le plus emblématique de cette dérive est sans contexte la suite logicielle Etamine/Notilus/Goelett dont l’usage s’est vu imposé aux agents CNRS partant en mission depuis juillet dernier. Depuis, ce funeste protocole, qui n’avait en réalité pour but que d'économiser des postes de gestionnaires, a surtout contribué, dans les faits, à dégrader davantage les conditions de travail de tout le monde, tout en ajoutant un frein supplémentaire au développement de la recherche publique. Ceci est attesté par un florilège de remontées négatives du terrain. Le ressenti des gestionnaires chargé de le mettre en œuvre peut (poliment) se résumer à celui de « pompiers chargés de réparer les défaillances d’un système ultra-rigide », alors que les chercheurs déplorent des pertes de temps considérables, s’accompagnant souvent de pertes financières, tant et si bien que certains se sont parfois résolus à partir en mission sans ordre de mission ! Pourtant, le CNRS s’est obstiné à maintenir ce protocole délétère envers et contre tout en promettant des temps meilleurs, une fois que son adaptation sera réalisée … En s’adressant respectivement aux gestionnaires, aux chercheurs et aux décideurs, les défenseurs acharnés de celui-ci (parmi lesquels figure A. Petit), pourraient faire leurs ces trois maximes Shadock1 :
- « Je pompe, donc je suis. »
- « En essayant continuellement, on finit par réussir… Donc plus ça rate, plus on a de chances que ça marche. »
- « S’il n’y a pas de solution, c’est qu’il n’y a pas de problème. »
Il n’en reste pas moins que même si un jour les problèmes informatiques devaient être résolus, ce protocole restera extrêmement chronophage pour les chercheurs (bien plus que celui servant à déclarer les missions préalablement) et impliquera donc un surcoût de fonctionnement principalement lié à la délocalisation de tâches administratives (déclaration de mission, états de frais contraignants)2 vers des personnels peu formés à celles-ci et non évalués pour elles. De plus, en raison de sa rigidité structurelle, ce protocole impose aux missionnaires des séjours dont l’emploi du temps détaillé a été figé au moins deux mois à l’avance, leur enlevant une souplesse qui leur permettait préalablement de profiter d’effets d’aubaine (invitation en dernière minute d’un collègue étranger à donner un séminaire, invitation à rester une journée supplémentaire pour un motif scientifique, etc) ou de gérer au mieux des impondérables qui surviennent souvent lors d’un séjour (annulation d’une visite, etc). Ce protocole agit donc principalement comme un repoussoir pour des chercheurs qui souhaiteraient s’investir dans les collaborations internationales. Par ailleurs, l’impossibilité de bénéficier des crédits de deux années consécutives pour des missions qui se situent entre deux exercices financiers constitue une limitation supplémentaire très sérieuse à l’organisation d’évènements structurants impliquant de nombreux missionnaires.
Dans son message du 13 décembre, Antoine Petit constatait que les annonces présidentielles « …rappellent notre contribution particulière à l'excellence de la recherche française » et se déclarait pleinement conscient de la nécessité du « choc de confiance » voulu par le Président. Pour conclure, il prétendait vouloir y travailler en même temps qu’il allait mener à bien les nouvelles missions que le Président a énumérées dans sa vision de la Recherche. Plutôt que d’annoncer vouloir s’engager dans ce vaste programme à l’avenir incertain, nous aurions préféré qu’il fasse immédiatement sienne la recommandation 7 du rapport de l’HCERES (« Lancer une « opération commando » pour répondre de manière urgente et décisive à la nécessité de simplifier les processus administratifs et de réduire le fardeau bureaucratique qui pèse sur la communauté du CNRS. ») et qu’il retire toutes affaires cessantes le protocole Etamine/Notilus/Goelett.
C’est pourquoi, FO ESR réitère (i) sa demande d’abandon d’Etamine et de Notilus pour faire cesser la souffrance au travail de tous les personnels du CNRS et (ii) demande que la direction du CNRS garantisse à toutes les victimes de cette « usine à gaz » qu’ils seront remboursés de tous les frais engagés sur leurs deniers personnels. FO ESR invite toutes les victimes concernées par ces pertes financières, y compris les pertes de crédits de laboratoire, à en faire remonter l’information au syndicat. Les personnels du CNRS ne sont pas des Shadoks et l’excellence scientifique tant vantée ne se maintiendra pas par des méthodes de Shadock, mais par un financement et un environnement de travail à la hauteur des enjeux visés !
Montreuil, le 22 janvier 2024
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